Une entreprise efficace est une entreprise dans laquelle chacun, individuellement, est efficace à son poste. Cela ne suffit pas. Il faut aussi que les valeurs ajoutées individuelles soient fédérées pour créer de l’efficacité collective.
La manière dont sont prises les décisions joue un rôle majeur dans l’efficacité d’une organisation.
Dans une organisation, les responsables prennent des décisions qui ont un impact sur d’autres individus : Les décisions leur seront annoncées, et ils devront les exécuter ou faire en sorte qu’elles soient exécutées. Elles provoqueront un changement pour ces individus.
Indépendamment du contenu de la décision, la manière dont est gérée la prise de décision aura un impact sur la réaction des individus face au changement induit par la décision, et donc sur l’efficacité individuelle et collective.
Prendre une décision ou “fabriquer une décision”?
Là où nous « prenons une décision », les anglophones « fabriquent une décision ». En anglais, « prendre une décision » se dit « to make a decision », c’est-à-dire « fabriquer une décision ». Cela traduit bien le fait que la prise de décision est un processus, et non simplement un choix parmi des options, comme pourrait le laisser entendre le terme « prendre une décision ».
Supposons qu’un patron de PME décide d’améliorer la traçabilité de ses produits. Il décide de faire installer un nouveau logiciel prévu à cet effet, et de mettre en place de nouvelles procédures. Un lundi matin, un technicien intervient sur le site pour faire la mise à jour des ordinateurs, et le patron annonce à son personnel que désormais il faudra appliquer la nouvelle procédure.
Même si la décision du patron de changer les procédures et d’installer un nouveau logiciel est bonne pour améliorer la performance de l’entreprise, il est possible que cette décision conduise à l’inefficacité totale… Suzanne considèrera peut-être que le nouveau logiciel est trop compliqué et n’apporte rien. Paul n’appliquera pas les nouvelles procédures parce qu’il n’en comprendra pas le sens. Jacques râlera à la machine à café, et la démotivation gagnera du terrain…
Chacun pourra toujours trouver une bonne raison de bloquer une décision qu’il subit, surtout s’il est mis devant le fait accompli, s’il ne comprend pas le choix qui a été fait, et s’il n’existe pas une confiance suffisante entre le décideur et les collaborateurs.
D’où l’importance de prêter attention au processus de décision dans son ensemble, et pas seulement au contenu de la décision.
Les étapes du processus de décision
Bien plus qu’un simple choix, la prise de décision est un processus qui peut être découpé en 4 grandes étapes : la PRÉPARATION de la décision, la DÉCISION (le choix), l’ANNONCE de la décision et la MISE EN PLACE de la décision. Ces 4 grands étapes ont chacune leur importance.
La PRÉPARATION de la décision : Elle consiste à définir la situation et les objectifs, à rechercher des options, et à analyser et classer les solutions.
La DECISION : Elle consiste à choisir une ou plusieurs solutions parmi les solutions envisagées.
L’ANNONCE de la décision : C’est le moment où le responsable, le manager ou le dirigeant annonce sa décision aux personnes de son groupe ou de son organisation.
La MISE EN PLACE de la décision : Elle consiste à répartir les tâches, les exécuter, mettre en place un contrôle de l’exécution.
Les difficultés qu’un manager peut rencontrer dans la prise de décision ne se situent pas nécessairement dans la décision elle-même. Elles peuvent se situer dans une manque d’adhésion à l’objectif (surtout si la personne n’a pas participé à définir cet objectif), dans un manque d’informations, une peur de l’annonce de la décision aux personnes concernées, l’anticipation de difficultés à mettre en œuvre la décision, la peur de déplaire etc…
Comment utiliser le processus de décision pour renforcer l’efficacité de l’équipe?
Phase de PRÉPARATION de la décision
Impliquer les membres de l’équipe autant que possible dans la phase de préparation de la décision est très important. D’un part cela permet de tirer profit au maximum des idées individuelles et de la créativité du groupe dans la recherche et l’analyse des solutions, et ainsi favoriser un meilleur choix.
D’autre part, cette implication permet de faire en sorte que chacun se sente concerné par le choix qui sera fait, même si en dernier lieu c’est le manager qui tranche. La décision aura toutes les chances d’être mieux comprise et mieux accueillie, et le changement généré mieux accepté. Les membres de l’équipe se sentiront plus engagés et responsables des résultats de la décision.
Ainsi, impliquer ses collaborateurs dans la phase de préparation de la décision représente pour le manager une opportunité de générer de la motivation et de l’efficacité dans l’équipe.
En fonction de la personnalité du manager, cela lui sera plus ou moins facile. Le gout pour le pouvoir, le manque de confiance en soi et en ses collaborateurs, la difficulté à animer des réunions, la peur d’être débordé, peuvent générer des réticences de la part du manager.
De plus, même s’il en a la volonté, il peut ne pas être aisé pour le manager d’obtenir l’implication totale des membres de l’équipe dans la recherche de solutions à un objectif, surtout s’ils n’ont pas participé à le définir. C’est pourtant souvent le cas dans les entreprises : le manager est chargé de relayer un objectif « venu d’en haut », auquel l’équipe doit répondre. Il sera d’autant plus facile pour le manager d’obtenir l’implication des membres de son équipe s’il a lui-même participé à la définition de l’objectif (celui-ci faisant alors partie d’une solution à un objectif donné par le N+1). En effet, si le manager et ses pairs ont été impliqués par leur N+1, l’objectif aura du sens pour eux, et ils sauront d’autant mieux en convaincre leurs équipes de son bien-fondé.
Cela montre que pour être efficace, l’implication des équipes dans la prise de décision doit se faire à tous les niveaux de la chaîne hiérarchique. Elle doit donc être une donc attitude, une « culture technique d’entreprise » pourrait-on dire.
Il y a bien sûr des situations où il n’est pas possible ni souhaitable d’impliquer les membres de l’équipe dans la recherche de solutions (décision de séparer d’un collaborateur, de promouvoir un collaborateur…). Même si l’équipe n’est pas impliquée dans la recherche de solutions, il est souhaitable qu’elle soit informée au bon degré et au bon moment, pour que la confiance puisse s’instaurer entre les membres de l’équipe et le manager. Il revient au manager de définir le degré d’information et le moment où il la délivre à l’équipe.
Phase de DECISION
Dans les entreprises, responsabilité et décision vont généralement de pair : le responsable décide, car il a la responsabilité des conséquences de la décision.
L’implication des membres de l’équipe dans la préparation de la décision ne remet pas en cause le fait que le manager puisse trancher en dernier lieu et fasse le choix de la solution.
Phase d’ANNONCE
La phase d’annonce de la décision est délicate, car parfois la décision a des conséquences déplaisantes pour une ou plusieurs personnes de l’équipe.
Face à cette difficulté de l’annonce, certains managers sont tentés d’esquiver et se débrouillent pour que « ça se sache » sans avoir à faire d’annonce, ou bien masquent une partie de la décision qui contient des conséquences déplaisantes, ou bien sont agressifs dans l’annonce, ou encore noient le poisson dans des précautions oratoires qui font que la décision n’est pas clairement comprise.
La difficulté de l’annonce est souvent liée à la peur d’être submergée par les émotions des interlocuteurs et par les siennes propres en retour. Si l’équipe a été impliquée dans la phase de préparation, l’annonce a de grande chance d’être facilitée pour le manager.
L’annonce d’une décision se prépare, à plus forte raison si la décision a des conséquences déplaisantes pour une ou des personnes.
La capacité à gérer son stress et ses émotions est un atout important pour le manager dans cette situation comme dans beaucoup d’autres situations de management. A ce propos, vous pouvez consulter l’article Stress au travail et risque de Burn Out, comment faire face?
Phase de MISE EN PLACE de la décision
La mise en place de la décision dans l’équipe sera facilitée si les membres de l’équipe ont été impliqués dans la préparation de la décision, et ont été clairement informés lors de l’annonce de la décision.
Concrètement, comment favoriser l’engagement et la créativité collective ?
Chaque groupe possède les ressources nécessaires pour faire émerger des solutions créatives. La difficulté réside dans l’expression de ce potentiel de créativité. Pour qu’il s’exprime, les membres du groupe doivent se sentir libres d’exprimer leurs idées. Cela nécessite une bonne confiance dans le groupe, ainsi que des règles de fonctionnement énoncées clairement par le manager et acceptées par le groupe.
Manager ou responsable de groupe, voici une méthode concrète pour une séance de travail qui favorisera la production de solutions créatives par le groupe, et ainsi l’engagement et l’efficacité du groupe.
- Poser les règles de fonctionnement, vérifier qu’elles sont acceptées par tous et demander si quelqu’un a une règle à ajouter.
- Chacun s’exprime personnellement et clairement
- Les réactions aux idées exprimées ne remettent pas en cause l’idée mais l’enrichissent
- Ne censurer ou n’autocensurer aucune idée
- Laisser chaque participant s’exprimer totalement
- Ne pas couper la parole
- Présenter l’objectif et le thème de réflexion
- Demander à chaque participant de réfléchir individuellement en silence et de noter toute ses idées.
- Chaque participant présente ses idées. Les autres participants le questionnent pour aider à préciser l’idée, sans jamais remettre en cause ce qui est exposé.
- Le groupe regroupe les idées par thème et sélectionne des thèmes à approfondir.
- Chaque grand thème est approfondi et enrichi.
- Le compte rendu reprend tous les thèmes, même ceux qui n’ont pas été approfondis.